ANNÉE 1983, DAVID, DERRICK ET DUSTIN, PASSIONNÉS PAR LA SCIENCE-FICTION ET LA POP CULTURE, DÉCIDENT D'ENVOYER UN MESSAGE DANS L'ESPACE GRÂCE À UN ORDINATEUR SOPHISTIQUÉ DEPUIS LEUR PETIT GARAGE À COSMOPOLIS, DANS LE CONNECTICUT. PUIS C'EST PARTI EN COUILLE.PLUS DE TRENTE ANS APRÈS, GRÂCE AUX EXPLOITS INFORMATIQUES DES "3D" (POUR "THREE DICKS"), LES ALIENS FOULENT ENFIN LE SOL TERRESTRE ! MAIS À QUEL PRIX ? C'ÉTAIT À L'ÉPOQUE UNE SIMPLE PASSION. NI FEMME, NI EMPLOI, DAVID, DERRICK ET DUSTIN ONT PASSÉ LE PLUS CLAIR DE LEUR TEMPS (ET LEUR VIE) À ÉTUDIER L'ESPACE ET LA POSSIBILITÉ DE LA VIE AILLEURS QUE SUR NOTRE BELLE PLANÈTE. SANS DIPLÔMES OU CERTIFICATS, ILS SE CONTENTENT DE CONCEVOIR DES ORDINATEURS ET AUTRES SOFTWARES CHEZ EUX DANS LE SEUL INTÉRÊT D'ENVOYER UN MESSAGE AU-DELÀ DE LA SURFACE TERRESTRE. ILS L'ONT APPELÉ CODE COSMO EN HOMMAGE À LEUR VILLE CHÉRIE (C'EST FAUX, ILS N'ONT JUSTE AUCUNE IMAGINATION), COSMOPOLIS.
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My enemy's invisible, I don't know how to fight !! || Iphigénie

*
ROTT
Caem
Crédits : 2
Caem

Lun 27 Aoû - 18:17
Inspire, expire.
Ce n'est pas une tâche insurmontable, il en est capable. Ses doigts tremblent. Son visage se maquille d'un sourire factice - qu'il a bien du mal à maintenir. Des inconnus passent devant lui sans qu'il ne retienne un seul visage, il se contente de leur tendre ce bout de papier, de remercier ceux qui le prennent, d'attendre la fin de ce calvaire. Une véritable torture pour ses nerfs. Ils sont prêts à lâcher, à n'importe quel moment, et il prie silencieusement. Il prie pour que ça arrive après.
Mais le monde est contre lui, toujours.

Un homme, d'une grande stature, se décide à marquer ce jour d'une pierre rouge ; il bouscule Caem qui, lui, bascule d'un état à un autre, et c'est le choc. Les feuilles tenues glissent entre ses doigts dans diverses formes ; mais aucune n'a encore sa forme d'origine. Elles se séparent en plusieurs morceaux et s'échouent sur le sol, en silence. Lui, a l'impression qu'il s'agit de son coeur, n'ayant supporté la pression, qui s'effondre sur le bitume froid. Son travail s'achève avec la perte des flyers, seulement ce n'est pas ainsi qu'il le voulait. Son patron non plus.

Viré, en un seul mot, un seul geste brusque de la main, et les siennes sont vides. On ne lui remet rien pour son dur labeur. Et il bascule, à nouveau. Inévitablement. Son coeur tambourine dans ses tempes et il ne s'entend plus penser. Ses pas l'éloignent de ce lieu pour s'égarer, n'importe où, la destination n'a que peu d'importance. Il veut se recroqueviller, appeler Jaemin, se rassurer d'une façon ou une autre, mais dès que ses doigts frôlent les tissus qui le recouvrent : ils se déchirent avec netteté, coupés par sa peau létale.

Cela ne s'arrête plus. Il en découpe un, puis deux, puis sa peau cède à ses effleurements mortels lorsqu'il essaie de retenir les vêtements de l'abandonner dans une nudité non-désirée. Caem ne sait plus très bien où il se situe et bientôt, ça n'a plus d'importance, car il s'échoue. Sous lui, quelque chose se détruit dans un bruit coloré d'orange - ça lui est plus désagréable au son qu'à la vue, jusqu'à ce qu'il réalise qu'il s'agit d'un légume. Il se redresse péniblement, passe sa main là où le jus l'a sali, mais son sang s'écoule aussitôt, une nouvelle plaie s'ouvrant sous son toucher.

Sa douleur s'affiche dans différents tons, des vagues dansantes dans son champ de vision flouté de larmes retenues, et il abandonne. Son corps s'écrase mollement sur le sol meuble, occupé par divers légumes, et il replie ses jambes. Caem se fait aussi petit que possible. Malgré la douleur, il s'entoure de ses bras, griffant cruellement son épiderme rougie, laissée à l'air libre par sa tenue décomposée. Il n'en a plus que faire. Le cauchemar ne cesse jamais réellement.
Et pour quoi ?

Parce qu'il n'est qu'un échec.

So I bear my skin

And I count my sins


*
Iphigénie
Crédits : 0
Iphigénie

Sam 1 Sep - 14:08
My enemy's invisible, I don't know how to fight
[...] Remplaçons l'étreinte par des ailes de goudron ➤➤ [Musique]
Iphy
Caem
➤➤ 1183
Comme il est étrange le son d’un cœur qui faiblit
Il ne suffit pas simplement de lever le poignet ou de porter le doigt jusqu’à la gorge pour l’entendre, il s’agit de plonger au centre de soi-même, d’y chuter la tête la première et de se raccrocher aux alcôves, de sentir sous ses doigts la surface rugueuse et déchirée de l’organe, d’observer cette étrange césure avec le monde, ce décalage de rythme qui ne souhaiter pulser ni avec les racines, ni avec les fumées de la ville,
De plus en plus lent sans qu’aucune douleur ne vienne pourtant cisailler son teint d’opale pâle.  

Elle est fatiguée, Iphigénie, harassée de nuits blanches passées dans le noir, les lèvres scellées par un grand secret qu’elle ne peut dévoiler ; il y avait en elle quelque chose d’infime mais de brisé, une rupture dans la ligne du corps, comme si ses omoplates se refusaient désormais à tracer la frêle courbe de l’oiselle qu’elle avait été. Elle se porte mal face au monde, peine à ne pas courber la nuque alors que son pas lourd l’amène entre ces ellébores et myosotis qu’elle aime tant ;

Il n’y avait en elle, à cet instant, plus aucun sourire à éclore, rien de bien impatient à vivre sinon que la terre eut bien réussi à redonner quelques couleurs à ces joues de porcelaine pâle, à disperser un peu la couleur de cendre en son iris,
Tout s’était recroquevillé au creux de son abdomen.
Atrophiée.

Des ramures appuyées contre son cœur, l’oiselle se laissait aujourd’hui à flancher.

Ses lèvres se marquent d’un soupir lassé alors que qu’elle achève de nettoyer une allée, puis ses pas la mènent jusqu’au vestiaire où elle retire ses bottes, les laissant là pour rechausser ses baskets ; elle avait travaillé toute l’après-midi, essuyé avec une peine immense des murmures et des regards auxquels elle ne prêtait habituellement aucune attention. N’était-elle pas assez bien pour ce monde ? Ne s’était-elle trop pas vêtue de ces cernes et de cette peine qui avait cassé au couteau son visage cristallin ?

Nulle réponse ne venait accompagner le rythme de ses pas mais chaque question rendait la danse plus périlleuse et elle se surpris soudainement à se souhaiter plus légère, à imaginer abandonner ses souvenirs entre deux fougères pour s’extirper de son insurmontable culpabilité. C’est finalement à la rouille du portail qu’elle accrocha une partie de ses rêves, surmontant l’immense hère noire d’un cadenas métallique qui fermait aussi efficacement le parc qu’une partie de sa candeur indésirée.

Puis elle avait commencé à marcher. À rentrer.
Il ne pleuvait pas tout à fait mais les nuages étaient suffisamment dense pour que la terre se fasse humide et Iphigénie y dansait plus qu’elle n’y marchait, peut-être parce qu’elle craignait que ses pas l’enfoncent dans le sol et que celui la garde prisonnière de son tombeau de poussières et de feuilles, offerte à l’acide brûlant du ciel et du vent qui coupe son âme de ses lames cruelles ;
D’une grâce haineuse tant que contenue dans le ciel, Iphigénie se surprenait à lever les yeux vers les nuages et à prier que ceux-ci ne se libèrent pas, parce qu’elle ne voulait pas voir la pluie s’entacher d’une terre aussi souillée que la sienne.
Tout au plus marchait-elle sur les sentiers, sur les jardins plutôt qu’au des rues, effectuant quelques détours pour rejoindre sa maison en restant sur l’herbe ; car cette ville-là, aujourd’hui, elle ne la supportait plus.

Lentement, ses pas l’emmenèrent jusqu’à chez elle. Un instant, alors qu’elle ouvrait la porte elle avait levé ses yeux jusqu’aux cieux – césure –, puis avait refermé le portail derrière elle alors que ses bottes crissaient sur le gravier blanc.

Une sensation étrange lui étreignait le cœur, serrait ses doigts squelettiques autour de son corps maigre ; quelque chose n’allait pas.
Un myosotis funèbre avait fleuri sur sa cuisse et, avant qu’elle ne puisse glisser ses doigts jusqu’à sa carne déchirée, les aboiements des chiens avaient déchiré la quiétude du jardin. Hésitants ses doigts pâlissent, se crispent une seconde sur la chair tendre de son visage avant qu’ils ne s’égarent jusqu’à la poche de son jean pour effleurer l’écran de son téléphone.

Inspire, Iphigénie.
Son cœur bat dans sa poitrine, tambourine, mais le souffle de l’oiselle est si régulier qu’un instant on eut pu croire qu’elle n’était plus tout à fait vivante, qu’elle se dissimulait derrière carne et glabre pour ne pas effrayer les hommes ; c’est de pas légers qu’elle contourne la maison, si délicats qu’ils ne s’égarent pas à marquer la terre.

Sa tête dodelinait de droite à gauche alors que la jeune fille retenait ses pensées entre ses doigts, crochetait ses ongles sur la crainte, comme si elle se plongeait dans la même transe éthérée que celle d’un rêve – il lui faudrait bien ça pour supporter la réalité, si le moindre danger s’imposait à elle. Ses lèvres se pourprent de crépuscules et hâtivement elle se dirige vers les chenils, ses jambes se pliant pour qu’elle glisse une main tendre vers le museau d’un des chiots ;  leur murmurant un « du calme » alors qu’elle s’efforce de trouver la source de son terreur.

Là. Au fond du jardin.
Entre les indolentes ramures végétales, quelque part dans l’entremêlement des fleurs et de la terre, des fripes humaines se mouvaient, déformaient corps et sourire en rampant sur le sol. Un homme, murmure-t-elle avec crainte, bien que la position du corps ne se laisse pas à deviner ; ses lippes effleurent en tremblant la possibilité d’un nouveau songe lorsque l’amarante fleurit par touches sur le sol ;

Wait. .
Il y a.
Un homme.
Dans son potager.
(en sang)

ET PUTAIN IL AVAIT SANS DOUTE ECRASÉ SES CAROTTES.

Ok.
Qu’il y ait un homme dans son jardin, ok.
Couvert de sang, ok — curieusement elle s’en foutait un peu de ces choses-là, depuis la fameuse soirée avec son oncle.
Qu’il soit manifestement pas très habillé, ok.
Mais putain, pas sur ses légumes.


D’un pas leste, et prudent, la jeune femme se rapproche, puis s’immobilise à quelques mètres ; une minute puis deux pendant lesquelles elle écoute uniquement les cymbales de son cœur (ses paupières se ferment trop vite comme si elle voulait effacer la vision des flots du sang de la terre retournée) puis elle se penche vers le sol, portant d’une voix forte pour que l’inconnu l’entende :

— Heu... salut ?

Une pause (elle reprend son souffle, la douce oiselle, il n’y avait rien de plus fragile que cette petite esquisse entre ses lèvres) avant qu’elle n’ajoute d’une voix hésitante :

— Tu as besoin d’aide ? Je crois ? ... Ou alors je devrais peut être appeler la police, là ? Enfin, je veux dire... mais mince, qu’est-ce que tu fais là ?


Toujours en toute intelligence, Iphigénie.
Un vieux reste de civilité lui intimait d’aller chercher des pansements, un reste de prudence de s’enfermer dans la maison et d’appeler les « autorités compétentes ».
Alors elle restait là,

Immobile,
Tremblante.

(et le cœur des oiseaux
se couvrait de vase
mais leurs ailes continuèrent à voler.)

Ceux qui n'ont inventé ni la poudre ni la boussole ceux qui n'ont jamais su dompter la vapeur ni l'électricité ceux qui n'ont exploré ni les mers ni le ciel mais ceux sans qui la terre ne serait pas la terre [...] Ⓒ Alcyon
*
ROTT
Caem
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Caem

Jeu 6 Sep - 18:54
Parce qu'il n'est qu'un échec.
Après quelques minutes, il ne sait plus si les coupures qui déchirent sa peau sont le résultat d'un accident ou s'il les fait volontairement, à ne plus vouloir subsister. Il n'a même plus la force de sangloter ; cœur meurtri à coup de poignards à la lame drôlement bien affûtée, mais les larmes continuent de s'accumuler entre ses paupières, jusqu'à ce que leur poids soit trop conséquent pour ne pas tomber. Elles roulent sur sa peau pour s'échouer sur le sol, déjà recouvert de divers liquides ; sang comme jus de légume.
Mais il ne peut plus rien faire ; ne veut plus rien faire.

Le bruit autour de lui ne l'atteint plus. Il en ignore les vagues colorées qui s'invitent dans sa vision brouillée, comme s'il mélangeait toutes les couleurs d'une palette, les diluait dans de l'eau. Mais il y a ce soudain rayon de soleil qui lui agresse la rétine, répétitivement. Il en plisse les yeux jusqu'à réaliser qu'il ne s'agit en rien d'un flot de lumière ayant percé la masse sombre qui couvre le ciel ; il y a du mouvement près de lui.
Habituellement, son premier réflexe serait de se mettre en position défensive, de reculer vivement et d'observer ce qu'il se passe. Toutefois Caem n'en a ni l'envie, ni la force. Alors il se contente de tourner doucement la tête et d'ouvrir les yeux, d'accueillir l'angelot dans son champ de vision. Il s'attarde un instant sur les prunelles vertes qu'il distingue derrière le voile humide de ses larmes, et en apprécie la teinte claire. Différente de celle saisissante de sa mère.

...Êtes-vous un ange ?

Un sourire naît sur ses lèvres, souligné d'amertume et du sarcasme du monde sur lequel il cracherait bien à cet instant. Les anges n'existent pas. Les héros non plus. Il est plutôt bien placé pour le savoir ; car s'ils étaient réels, sa vie n'aurait pas eu un tournant aussi cauchemardesque, à lui enlever chaque élément lui apportant de la joie, les uns après les autres.
Dont l'un ayant été détruit par un de ces soit-disant superhéros.
Usant du peu de force dont il dispose encore à ce stade, Caem s'essaie à se redresser, poussant sur ses avant-bras. L'un dérape, mais l'autre tient bon. Il voit les gouttes de sang qui courent sur sa peau ou s'échouent sur le sol, ses plaies encore béantes se déversant de son fluide vital à chaque effort ; mais il ne s'arrête pas tant qu'il n'est pas assit. Se savoir en grande majorité dénudé ne le perturbe pas, son esprit bien trop préoccupé par d'autres choses pour ne serait-ce que s'en rendre compte.

Désolé pour le... bazar, je voulais pas...

Sa voix s'éteint avant de finir sa phrase et il ne fait que soupirer son désarroi plutôt que poursuivre. Il y a tant de choses qu'il ne voulait pas faire. Désormais, il n'a plus que du regret plein le cœur, et ses yeux pour pleurer son malheur. Justement, ces derniers ne cessent pas de laisser s'écouler des flots de larmes qui, pourtant, ne change pas son expression de pure lassitude, de fatigue morale et d'absence d'âme.

Appelez qui vous voulez, ange, si vous avez peur de moi

Il esquisse l'ébauche d'un sourire, trempé dans la mélancolie de son univers.


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And I count my sins


*
Iphigénie
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Iphigénie

Ven 19 Oct - 21:21
My enemy's invisible, I don't know how to fight
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Iphy
Caem
➤➤ 1028
Comme il est étrange le son d’un cœur qui s’arrête
C’est une caresse dans la poitrine, une empreinte qui se creuse non en dévorant mais en effaçant, c’est une valse de pluies et de jours humides qui éclot les graines dans ses poumons, les nénuphars incandescents ;

Il fallait bien quelques fleurs après tout, quelques glaïeuls arrachés au ventre de la terre pour laver l’affront, pour masquer l’absence totale de battements, de vitalité ; harassée d’être cette effigie qui se tient si droite et si belle quand ses genoux se disloquent, quand sa peine se dilue dans les souvenirs et se noie de l’instant présent ;

Respire, Iphigénie.
Sois lunaire. Sois solaire.


C’était la banalité de l’horreur qui venait blanchir lèvres si vaillantes, et son regard se trouvait fort indécis alors qu’elle observait le corps présenté à elle ; le rouge lui paraitrait presque trop sombre, si elle ne sentait pas cet anathème pressant contre ses joues, cet instinct doucereux qui écossait gerles et dahlias sur sa peau d’obsidienne pâle. Du sang, n’est-ce pas. L’oiselle épiait craintivement l’homme étendu dans son jardin et elle songeait, elle délirait des rêves éveillés dans une multiplicité de possibilités qui l’effrayaient ; parce qu’elle n’était pas accoutumée à choisir, Iphigénie, et que la moindre décision se parait du voile de responsabilités trop lourdes à porter ;

Elle pourrait s’enfuir.
Elle pourrait hurler.
Elle pourrait l’aider.


Alors l’avenir coule sur ses doigts comme du bleu de méthylène, il sèche les larmes et trace les rêves, et bientôt ce sera son visage lui-même qui se fendra de milles errances, ce seront ses mains frêles qui enserreront les cœurs ennemis, ses paumes qui soigneront l’épaule impie ; alors le doute la saisit, ses jambes flanchent et elle daigne s’accroupir près du démon recroquevillé, ses doigts cillant la terre pour trouver un ancrage dans une vie qui ne file que trop vite.

— ... Êtes-vous un ange ?

Le murmure la surprend. Elle se recule, se considère elle-même avec cette stupéfaction qui n’appartient qu’aux âmes indécises ; pourtant elle-même se serait trouvée fort vilaine, l’oiselle, avec son cœur tordu d’humus, les songes fondus sur ses joues et ses mains qui avaient espéré la pluie jusqu’à marquer la forme du ciel dans ses paumes ; il n’y avait rien de plus étrange, sur son visage, que ses lèvres qui ne demandaient qu’à sourire mais s’étaient tordues en un rictus sérieux, que l’inquiétude qui avait coupé ses joues au couteau ;

Mais ne parvenait pourtant pas, une seule seconde, à ôter la candeur chamarrée de ses prunelles vertes.

Était-elle un ange ?
N’était-elle pas juste différente, après tout ?


L’idée lui semble étrange, mais pourtant elle s’égarerait bien à y croire, l’oiselle, à se faire angélique puisqu’on lui proposait ce nouveau rôle et qu’elle s’en trouvait fort aise ; d’insolente créature elle s’égare à revêtir un habit de grâce et, si nul de ses mouvements ne vient dévoiler cette félicité nouvelle, quelques émeraudes parent ses iris ternes d’une lueur plus vivante. Plus rassurante, en quelque sorte ; nul n’oserait atteindre un ange, n’est-ce pas ? Alors cette fois, lorsque l’inconnu ouvre à nouveau les lèvres, elle ne daigna ni s’effrayer, ni esquisser un énième pas pour fuir vers le monde qu’elle connaissait.

— Désolé pour le... bazar, je voulais pas... Appelez qui vous voulez, ange, si vous avez peur de moi.

Les mots résonnent. Elle hésite. Longtemps, sans bouger (icone chérubienne). Devrait-elle l’aider, ou partir sans rien dire ? C’est finalement un sourire qui vient accompagner le mouvement de ses lèvres, un peu timide dans son cancrelat d’améthystes dorées, et ses os craquent, et elle se redresse comme l’on danserait une opprobre funèbre ; ses mains serrent l’oiseau dans sa gorge, étouffent l’ombe de folie qui s’était égarée, une seconde, à délacer ses entraves. Aurait-elle été plus hardie qu’elle aurait sans nul doute murmuré « appelez-vous toujours les filles « anges » pour vous départir des situations délicates ? », mais seul un air sérieux s’était invité sur ses traits alors que douloureusement elle soufflait :

— Ça ira. Manifestement vous n’êtes pas en état de… Je vais vous chercher quelque chose.

Et elle se glisse l’oiselle, ses pas se fondent à l’herbe avide d’averses détrempées, s’égarent un instant près du chenil pour qu’elle puisse rassurer ses chiots ; calmant les aboiements qui, secondes après secondes, révèlent le silence assourdissant d’une ville sourde. Puis de fatalité l’effigie se presse, court plus qu’elle ne marche vers la maison, déverrouille la porte, se jette jusqu’à la salle de bain ; referme ses mains d’ange pâle autour d’un seau qu’elle remplit d’eau, puis de deux grandes serviettes et de bandages. Laisse un message sur le répondeur de son frère avant de poser son téléphone rarement utilisé sur la table, hardie plus que prudente.

(Et chacun de ses gestes, lorsque viendra le crépuscule,
Ne sera plus que l’instant avorté d’une fatalité bien plus grande).

Deux minutes plus tard, l’oiselle foulait à nouveau l’herbe fraiche de pas bien plus lourds, et ses poignets pliaient sous le poids du seau. Elle s’arrête, ses pieds dérapent sur les tomates écrasées puis elle s’accroupit, chacun de ses gestes esquissés non pas à l’intérieur du corps mais à l’extérieur, dans une prudence feinte qu’elle avait érigé autour d’elle comme des ailes angéliques – blanches iphigénies autour de son corps. Et c’est chacun de ses gestes qui vient alors peindre cette même grâce quand elle humidifie une serviette, puis la tend vers l’homme blessé :

— Je… tu… Vous en avez besoin je crois ? Enfin vous… C’est votre sang, hein ? … Pas celui d’un autre ?

Peut-être aurais-je du me poser la question avant, se murmure-t-elle avant de se reculer d’un pas, sa paume appuyée contre une racine humide. Une longue inspiration vient crever le sourire inquiet sur ses lèvres mais, plutôt que de signifier l’exaspération, éclot brusquement en fleurs humides, en petit éclats d’elle qui se greffent sur sa peau et ses murmures boisés,

Délicats à s’en briser mais pourtant aussi lumineux qu’une âme,
Symbolisant avec dextérité le courage d’un être qui se risque à s’éteindre pour aider son prochain.

(Comme il est étrange le son d’un cœur qui repart)


Ceux qui n'ont inventé ni la poudre ni la boussole ceux qui n'ont jamais su dompter la vapeur ni l'électricité ceux qui n'ont exploré ni les mers ni le ciel mais ceux sans qui la terre ne serait pas la terre [...] Ⓒ Alcyon
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ROTT
Caem
Crédits : 2
Caem

Mar 12 Fév - 19:56
Elle ne s’effraie plus, remarques-tu dans ses iris aussi vertes que la prairie dans laquelle tu as soudain l’impression d’être, à sentir la douce brise caresser ta peau blessée, dans une sérénité qui t’est inconnue. L’eau qui s’écoule de tes paupières pourrait en être la cascade, au bout du chemin, et les larmes échouées sont proches d’en former le ruisseau paisible.
L’ange n’avait utilisé aucune formule magique pour briser ton tourment, tu le ressens toutefois ainsi. Elle détale, mais ce n’est pas pour te fuir, on ne signe pas le début d’une chasse à l’issue mortelle. Non, elle reviendra, elle et son halo de lumière, pour percer les nuages sombres qui flottent au-dessus de toi.

A son retour, la cascade a cessé d’être, ne laissant derrière elle que des sillons humides, un cœur battant sur le rythme de l’existence acceptée.

Tes yeux se portent sur la serviette humide que l’on te tend et tu la soulages de ce poids dans un geste à la fois lent et mécanique, prudent à ne rien déchirer de plus entre tes doigts au son métallique.
Elle ne doit pas te toucher, pas une seule seconde, pas le moindre effleurement.
Sa question ne te surprend pas, t’arrachant l’esquisse d’un sourire amer, issu du secret de ta vie nocturne, de la vérité masquée ; celle qui aboie avant de faire une nouvelle victime. Est-ce le sang d’un autre ? Une interrogation bien légitime, en te connaissant. Et tu es tenté, de lui montrer les tableaux noirs de ton existence, de lui répondre dans un sourire : pas cette fois. Seulement, les commissures de tes lèvres restent tournées vers le bas, attirées par une force invisible, celle qui t’écorche le cœur et a sûrement un nom qui te déplaît.

Ce n’est que moi, murmures-tu après un instant de réflexion, d’introspection, pour réaliser qu’il n’y avait là que Caem. L’enfant brisé, arraché à sa vie de misère pour le jeter en pâture aux lions, abandonné pour mort mais survivant dont l’âme s’était déjà échappée. Une coquille vide qu’on essaie tant bien que mal de garder en un seul morceau, dans l’espoir qu’un souffle de vie reviendra le hanter. Il n’y avait que toi. Rott était loin, rangé avec soin au fond d’un tiroir, dissimulé sous divers tissus.

Tu inspires longuement, dans le besoin de trouver du courage, celui d’affronter ta propre souffrance, puis tu passes lentement la serviette sur ton bras pour en faire disparaître les longs sillages carmin. Il n’en reste que des traits, rougies par l’événement récent, d’autres se font blancs par l’ancienneté. Il est difficile de distinguer la douleur dans tes traits, tirés par le sérieux, la concentration que te demande cette tâche, mais elle est présente à t’en voler ton souffle. Tu ne le reprends qu’une fois le tissu éloigné de ta peau, essorant l’eau devenue rose, et tu recommences.

C’est mieux si vous me touchez pas..., penses-tu tout à coup à préciser, à l’avertir avant que son altruisme ne vienne la heurter à tes lames, que son sang ne se mélange au tien.

Quant à toi, tu ne te sens pas méritant de son regard, alors tu l’évites. Le rose ne se marie pas bien avec le vert. Tu aurais l’impression de la souiller, si tu la regardais. Tu as l’impression de la souiller, quand elle te regarde.
La serviette se tord dans ta poigne ferme et l’eau qu’elle renferme se déverse sur ta carne blanche sur laquelle l’on a peint une sinistre histoire. Tu observes les gouttes qui roulent le long de tes cicatrices et tu te questionnes. Comment en es-tu arrivé à là ? Aurais-tu pu éviter tout ceci ? Peux-tu encore réparer tes erreurs ? Seras-tu capable un jour de te tenir à nouveau devant lui ?
C’est un flot de sentiment qui se répand en toi, qui s’agite sous ton épiderme, bouillant dans tes veines et fourmille sous la pulpe de tes doigts. Les mots t’échappent sans que tu ne le réalises, sans que tu ne puisses rien que penser à les retenir :

Que faire, quand tout paraît désespéré ? C’est possible de s’en sortir ? ...Devrais-je m’en sortir ?

N’as-tu pas déjà survécu à suffisamment ? Il est peut-être temps de rendre les armes – et dès que les mots t’ont traversé l’esprit, tes mains se baissent et frôlent le sol terreux.


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