[no rest for the wicked]
no one can see them your angels and demons are testing how low you'll go the sunsets on sunset as dark as your heart gets it's best if you just say no but are you strong enough? are you wise enough? are you given up? will you disappear?
On est vendredi soir, et comme chaque vendredi soir, tu as ton cours de violon. Enfin, plutôt, tu penses avoir cours, et tu es déjà sur place, en train d’attendre, quand on t’annonce que ton professeur ne pourra pas venir à cause d’un « empêchement ». Tu laisses filer un soupir exaspéré en comprenant que tu as fait le trajet pour rien, mais tu ne peux pas faire grand-chose d’autre pour exprimer ton mécontentement. Il ne te reste plus qu’à rentrer.
Le retour n’est pas très long, et tu es encore de mauvaise humeur quand tu arrives chez toi. Mais après tout, songes-tu en tournant la clé dans la serrure, il faut voir le bon côté des choses : au moins, ça te fait une soirée de libre. Tu dois toujours finir ce bouquin que tu as emprunté l’autre jour à la bibliothèque. En plus, si tu ne te trompes pas, ton père ne devrait pas être rentré avant un moment, ce qui signifie que tu as l’appart pour toi tout seul pendant quelques heures. Cela ne change rien à tes plans, mais au moins, tu n’auras pas à jouer les ninjas dans l’appartement pour éviter de le croiser. Tu pourrais même t’installer au salon, pour changer. Tout en réfléchissant, tu continues à te déplacer et tes pas t’ont mené à la porte de ta chambre, que tu pousses machinalement. Tu fais glisser l’étui de ton violon de ton épaule, allumes la lumière, et –
Holy shit.
Debout au beau milieu de ta chambre se tient un homme portant un costume sombre. Son visage est dissimulé par un masque rouge, et il a ce qui semble être un livre entre les mains. En regardant plus attentivement, tu reconnais avec horreur un manga qui t’appartient, mais pas un de ceux qui trônent fièrement sur tes étagères. Non, celui-là se trouve d’ordinaire bien caché sous ton lit, avec deux ou trois autres du même genre ; une cachette dont la sûreté te paraît soudain bien relative. Heureusement qu’il n’y a rien d’important là-dessous, songes-tu avec une pointe de soulagement qui cependant ne change rien à la situation extrêmement embarrassante (et légèrement inquiétante) dans laquelle tu te trouves.
Quelques secondes s’écoulent sans que tu ne fasses le moindre bruit. Qu’est-ce que tu es censé dire au type qui est rentré chez toi par effraction (pour une raison que tu ignores, mais tu doutes qu’il s’agisse d’un simple cambrioleur vu son accoutrement) et a découvert ta collection de hentai ? Une petite voix te murmure que tu devrais appeler la police, et tu t’apprêtes à glisser discrètement une main dans ta poche pour attraper ton téléphone lorsque tout à coup, ça fait tilt dans ta tête.
Tu te détends légèrement.
— Vous êtes à Eurêka, non ?
Tu en es presque sûr, non, tu en es absolument sûr, même. Ta mémoire te trompe rarement, et même si son nom t'échappe encore, tu es persuadé que ce mec est un super-héros. Ce qui peut signifier deux choses : soit il s'est trompé (de chambre, d'appartement, d'étage), auquel cas tu n'as rien à craindre, soit il enquête sur toi.
OK, Lex, reste calme. Eurêka a probablement des soupçons à ton sujet, mais tout va bien. No big deal. Il suffit de détourner l'attention en te comportant comme n'importe quel ado normal n'ayant rien à cacher – rien d'illégal, du moins.
— Hum, le… enfin, ce que vous avez trouvé. C’est pas à moi, hein.
Ton malaise palpable est tout aussi authentique que le rouge léger qui vient couvrir tes joues. Tu t'efforces de prendre un air innocent ; d'ordinaire, ça te réussit plutôt bien, mais là, étrangement, tu doutes que cela suffise.