marche avec le diable (wolfgang)

musique - Il traîne la valise de son bras fin comme une brindille, peine à marcher avec ses jambes arquées. Bouscule les gens sur son passage, lâche des soupirs, des râles, des regards mauvais. C'est pourtant le coeur jeune et plein d'espoir qu'il observe la gigantesque pancarte bleue étendue devant ses yeux.

Bienvenue à Cosmopolis.

Aux antipodes de sa routine rurale, il découvre alors un paysage inédit. Au loin, la métropole brille comme un gigantesque feu d'artifice. Un sourire s'esquisse sur ses lèvres rosées tandis qu'il serre le manche de son bagage un peu plus fort.

Quand soudain, il se retourne. Il y a un homme, à quelques mètres de là, les mains dans les poches de son imperméable.

Puis, il n'aura fallut que d'un regard.

Wolfgang.



Combien de mois se sont échappés ?
Deux. Peut-être trois. Peut-être quatre. Sans un mot, un appel, un regard. Et pourtant, ni curiosité, ni inquiétude n'avait eu le temps de germer dans son esprit. Gabriel attend là, sereinement, debout face à une multitude de visages qui disparaissent de sa mémoire aussitôt en sont-ils rentrés. Lorsque tout à coup, au coeur de cette fourmilière, se dresse une silhouette familière. Son sourire rend ses pommettes plus saillantes qu'à leurs habitudes et, d'un pas quasi militaire, il s'avance à sa rencontre.

Eh bien, on dirait que Cosmopolis n'a toujours pas eu raison de toi.

Wolfgang ne subit jamais les dommages de la fatigue ni de l'âge, comme figé des années en arrière. De la lueur de ses yeux jusqu'à ce sourire en coin qui lui est propre, Gabriel le reconnait là comme au premier jour.
Il n'avait fallut d'un rien pour faire éclore de la sympathie à l'égard du commissaire qui s'est vite présenté comme un modèle à suivre, une véritable idole depuis ses dix-huit ans.

J'ai beaucoup de choses à te raconter. Lance-t-il d'un ton presque trop enthousiaste. J'espère que toi aussi.

[size=12]musique - Être les bras protecteurs de tout un peuple - c'est vrai qu'il y aura toujours quelque chose à en dire. Gabriel sourit, très simplement. La garde baissée malgré lui, il s'abandonne à une balade le long de la grande place, suivi de près par son ami de toujours.

Je suis désormais mentor. Annonce-t-il d'un rire qui se veut presque moqueur à son égard. Aux côtés de Wolfgang, cela sonne comme une énorme plaisanterie, lui qui n'a fait que subir ses écarts de jeune adulte, à une époque. J'ai pu réaliser à quel j'ai pu être une plaie pour ceux qui m'ont tendu la main, autrefois. Son haussement d'épaule appuie ses dires. Toi y compris.

Quand bien même Faden ne disait mot, déjà en ce temps, ses regards parlaient d'eux-mêmes. De l'exaspération à l'agacement, de la fierté à la déception. Mais voilà où est sa force : dans un simple coup d'oeil. Oh, ça, Ardan ne s'en souvient que trop bien ; cette angoisse qui le dévorait dès qu'il cherchait à l'affronter.

Harry - c'est son nom - est un rejeton du Cercle de Mammon. Un... favori de Cordell, j'imagine que tu as déjà eu vent de l'affaire. Il se racle la gorge, loin de faire face à une quelconque hésitation, puisqu'après tout, Wolfgang savait déjà tout. J'ai voulu tuer Cordell. Je l'admets. Mais les choses ne se sont pas déroulées comme prévues. À vrai dire, je crains que malgré derrière les barreaux, quelque chose finisse par arriver. À moi, ou à mon élève.

Ses attentions à l'égard de Marlow le trahissent très certainement, quand bien même le mensonge ne sera jamais une solution face au commissaire le plus redouté du continent. Je ne le laisserai plus faire de mal, Gabriel se stoppe aussitôt, yeux dans les yeux, je tenais simplement à ce que tu le saches.

De toute sa haine, de tous ses égards, Blue n'a pour seule doctrine que de ne jamais blesser ni femme, ni enfant, et tout homme se permettant de s'y dérober devront en payer le prix. Une drôle d'histoire, pour celui qui ne cille pas lorsqu'il brise un doigt, phalange après phalange, le sourire placardé au coin des lèvres.

Wolfgang ne démontre ni surprise, ni inquiétude, ni curiosité. Fidèle aux principes que Gabriel avait dû deviner au fur et à mesure des années, il préfère se taire plutôt que davantage sous-entendre son besoin d'aide. Faden n'est pas un imbécile, bien au contraire et s'il y a bien une raison pour laquelle il n'est jamais intervenu dans sa vie jusqu'ici, c'est bien parce qu'il a conscience de l'amplitude de ses capacités - même enfouies.

J'ai commencé à faire de nouveaux cauchemars, la nuit.

Ardan a le regard vacant un instant. Cette angoisse le ronge depuis quelques mois maintenant et malgré les horreurs auxquelles il peut faire face quotidien, c'est celle de son esprit qui le torture le plus. Je ne saurais pas le décrire, ajoute-t-il, mais parfois, je vois ton visage.

Alors, il rit. Il se moque de lui, de ses inquiétudes, tandis qu'il ne peut pas donner plus d'explication à ses états d'âme. Je pensais que tu ne me faisais plus peur depuis longtemps. J'imagine que j'ai eu tord. Son sourire s'amenuise à la rencontre ses yeux.

Très vite, pourtant, il balaye les doutes et enterre six pieds sous terre ces discours ridicules.

Parle-moi de toi. De comment tu as survécu, ces derniers temps.