j'ai un cœur, mais c'est comme les tekm, on le voit pas

Whatever goes upon two legs is an enemy.

dans la vie de river il y a trois choses ; la tête, les tekm et Elle. son nom c'est V I C T O R I N E. il a le goût de la cassonade et explose en mille systèmes solaires. victorine c'est le big bang et river n'est rien qu'un petit quasar au débouché de l'entonnoir. reste encore un peu s'te-plaît, j'suis pas prêt à vivre dans le monde. tu resteras dis ?

la victoire, ça se roule par terre avant.
ça mord la poussière ça se relève et ça dit ;

je sais maintenant attacher mes chaussures, comment faire un café, mes calculs intégraux et voler.

river c’est un zéro sur deux pattes qui ne part jamais sans son livre de calculs intégraux et différentiels, qui a lu les classiques pour comprendre le langage, qui parle du sexe comme nécessité (le skate le cheesecake les congés les oranges l’horizontalité aussi), qui engage les conversations en demandant entre un tekm et ta fourchette qu’est-ce qui a plus d’âme que l’autre ?, qui imagine victorine chez toutes les filles, qui n’est pas amoureux de victorine, qui a juste besoin de victorine, qui aime tout de suite les gens dont le prénom commence par v, qui s’achète les derniers jeux vidéo, qui ne veut pas travailler, qui envoie ses c.v. parce que son dad l’embête, qui rentre à deux heures parce qu’il cherchait dans la décharge des modules à remonter, qui se drogue à coup de ramens au kimchi, qui s’emmerde parce que l’école c’est facile, qui comprend enfin la culture populaire, qui ne sait cuire ni des ramens ni un œuf dur, qui ne sait pas coudre, qui ne sait pas argumenter, qui ne sait pas danser, qui ne sait pas chanter, qui connaît pourtant la métrique et le solfège, qui ne sait pas différencier une jeune fille en jupe courte et une fille de rue (mais on est en plein hiver, elle va attraper froid à attendre comme ça), qui ne saisit pas les concepts codés de genre, qui se spoile sur tout parce qu’il déteste les suspenses, qui dit bien ce qu’il pense (poliment, merci de l’éducation mom), qui ne le fait jamais méchamment, qui est trop mou pour lever un poing, qui se fatigue rien qu’à l’idée de se battre, qui admire sa mère parce qu’elle a l’esprit et le corps d’une avant-garde, qui apprécie énormément l’art, qui parle plusieurs langues (anglais, français, italien, allemand), qui ne vivrait pas une seconde sans écran-fil-hologramme-programmation-serveur, qui n’a traîné que dans des bars jazz et des cafés d’artistes (encore une influence de mom), qui rêve de goûter à un cuba libre, qui trouve ironique un cocktail au nom de cuba libre, qui voit son dad deux fois aux deux semaines, qui se fait bichonner par dad (pourquoi ???), qui rêverait de monter à bord d’un vaisseau alien, qui court à trois heures du matin parce qu’il vient de penser à victorine, qui a le look du sportif-bien-chaud-et-débile, qui est en vérité un-premier-de-classe-seul-dans-son-coin-parce-que-franchement-il-sait-pas-dire-bonjour-dans-le-langage-commun-de-son-âge, qui corrige n’importe qui sur la langue, qui classe le dictionnaire et bradbury en premiers largement devant la bible, qui préfère dire oui-oui plutôt que de s’obstiner, qui aimerait bien envoyer chier, qui aime maintenant la kpop et les chansonniers français (la faute à victorine), qui calcule chaque jour les probabilités de revoir victorine (il en est à 812 jours de compte), qui ne veut pas faire médecin, mais écrivain de la nouvelle formule mathématique ou du nouveau système de son à lévitation-wireless.

mom pense qu'il est un peu obsessif.
sûrement.

exi(s)t
– et pourquoi on doit partir ?
– parce que c’est plus chez nous ici.
– et ce sera où ; chez nous ?

emmi s’est penchée ; avec ses cheveux courts et ses yeux volés au ciel. elle a regardé son fils. elle a caressé ses cheveux. elle a replacé une mèche. pendant une seconde, elle croit voir paul, mais non ; c’est émile. elle dit :

– écoute trésor tu as le choix, chez nous, ce sera ici avec papa si tu veux et je viendrai te voir dès que je pourrai. ou chez nous, c’est avec moi là-bas, ailleurs. mais mon trésor, ça peut pas être les deux, ça peut plus être les deux.

émile se souvient des discours de mom. il se souvient des mots tirés comme des fusils quand elle existe. il se souvient des mains qui tissent ses rêves et sculptent sa voix. il se souvient de ses pieds qui font danser les siens, dans la cuisine près de dad.

et dad.

émile ne se souvient pas de grand chose. un confort pour un con fort.
c’est mom qui le dit.

sept, pour l’éternité. sept, pour la statut de la liberté. sept, pour l’arc-en-ciel. sept, pour l’avenir. parce qu’emmi a pesé son cœur quand émile avait sept ans. petit, recroquevillé dans la poitrine, mom n’en peut plus. elle regarde dad et lui demande de faire quelque chose. n’importe quoi, mais elle voit bien qu’il a peur. c’est vrai que ça effraie ; tout laisser tomber. les diplômes les mentions le salaire les extras mais on doit faire quoi pour un peu de liberté, le genre qui coule dans les veines et défroque les discours ?

sept, pour athéna
parce que penser ne demande que sept choses ; des mots des mots des mots des maux des mots des mots des mots.

et mom, elle connaissait plus que vingt-six lettres.
alors elle est partie et émile aussi.
entre le glorieux silence et la furieuse reconnaissance, il trouve plus attrayant d'exister.

when tekm met heart
depuis toujours, river lutte contre le racisme. on ne dit pas boîte de conserve, on dit goldorak ou bien ava ou bien roy ; y'a un cœur là-dedans et ça le blesse. river sait qu'il est humain, mais ça n'empêche pas de revendiquer un peu d'amour pour autrui. et puis, le garçon se sent proche des tekm. lui aussi se fait traiter de machine. juste parce que son niveau de calcul est digne d'un universitaire (ok peut-être un peu moins). juste parce qu'il n'arrive pas à lire sans élaborer une analyse casse-pied. s'il se compare à la classe, river dirait qu'il a un cœur, mais seulement bien caché.

depuis toujours, ça ne le dérange pas, les amis c'est éphémère sur la ligne du temps.

la première fois qu'il l'a vue, elle lisait l'homme illustré en écoutant by the rivers of babylon. la première fois qu'elle a prononcé son nom lors de la dernière année élémentaire, il s'est senti plongé au cœur de la scala à écouter la callas.

river s'est levé au milieu des pupitres. il a rivé ses yeux sur elle. il a dit :

– bah voilà, il est là, j'l'ai trouvé.

river parlait de son cœur, mais personne n'a saisi.
river avait un cœur qui s'appelait victorine.
elle sentait bon les tangerines.

règle de trois
river vit en majorité avec mom ; ils sont beaux ensemble. c’est son grand garçon, son premier de classe. peut-être qu’il fera médecin comme elle, qu’il sauvera des vies le jour avec des gants blancs et la nuit avec des tracts. mais river ne manie pas la langue comme mom. il croit en ses arguments, mais c’est pas un dur, un cassos fou. lui, il préfère casser les réseaux. il préfère rester dans l’ombre à coup de pseudo entre deux hack et un 100% en math. de toute façon, mom elle dit que si la violence est pas symbolique ça sert à rien. tout est une question de symbole.

si tu brises ma vitre holographique je revends tout ton stock informatique, mais la dernière voiture volante de ton père, tu peux bien la décaper si ça te chante. ce gosse de riches avec du beurre dans les yeux.

les règles ;
si ça se rachète en faisant pleuvoir le fric, casse tout ça vaut rien.
si ça se rachète avec la peau du cul, tu touches pas tu louanges.
si ça s’échange, ça se troque, tu canonises.  

quand même, river se dit qu’il a de la chance
l’école se paye bien.

amandes étoilées
mr. jian a franchement la plus belle fille du monde.
river pourrait monter un exposé d’une journée sur ses yeux noirs ; sa bouche fine comme un trait de crayon et son visage rond.

– vi, ça fait dix minutes que tu me fixes.
– pas ma faute, j’étudie la profondeur de ton regard par rapport à la profondeur réelle de ta cavité oculaire. tu sais rin que t’as les plus beaux iris du monde ? et les pupilles aussi. je sais jamais ce qu’ils pensent ; c’est fascinant. comme présentement, la petite lueur ça veut dire que je te fais rire ou que je te flatte ou bien...


mais la teigne de douze ans se tait parce que victorine vient de lui faire un petit baiser de la main. il tire la langue ; c'est dégoûtant ! river se sent aussitôt insulté.

– mais t'as vu comment il t'a répondu ?! c'est disgracieux déplorable impardonnable irrespectueux allons rin il sait juste pas ce qu'il manque. moi franchement si j'étais avec une fille qui a lu tout bradbury je la demanderais en mariage tout de suite !
– vi.
– oui ?
– tu parles comme un adulte.
– oh.

vi. oui ? on a juste douze ans. vi. oui ? j'ai peur du noir. vi. oui ? tu peux lâcher ma main. vi. oui ? tu as le droit d'être fâché. vi. oui ? les enfants à notre âge ça va en colonie. vi. oui ? lâche ton téléscope. vi. oui ?. tu peux arrêter de me surveiller. vi. oui ? montre-moi les calculs de ton cœur. vi. oui ? tu me fais rire. vi. oui ? t'es chiant, mais je t'aime bien.

les z'amoureux ils se bécotent ils vont faire un bébé ouh ils se tiennent par la main ouh émile a donné un vieux livre à victorine ouh elle lui a fait un bisou sur la joue ouh émile est plus petit ils sont trop bizarres victorine pourquoi il te dit jamais je t'aime ? c'est un lâche émile est un gros lâche.  

rin, ça veut dire quoi ; btw, mmrs, w.t.p. ; lmao ; af ; ffs ? rin, c'est quoi un ollie, un indie ? rin, combien ça coûte une slush ? rin, pourquoi les adultes partent sans rien dire ? rin, tu devrais pas manger tous ces bonbons, le diabète à ton âge c'est terrible. rin, t'as un pli dans ta jupe ; voilà c'est bon. rin, c'est quoi de la peanut ? rin, t'as une mèche de travers. rin, pourquoi est-ce qu'ils nous demandent tout le temps de s'embrasser ? rin, pourquoi les gens font pas la différence entre peindre et peinturer ? rin, tu sais que tu as les proportions idéales pour un croquis ? rin, tu voudrais pas être astronaute pour ma fusée ? elle aurait ton nom, ça serait la victorine jian II parce que j'aurais raté la première.

– rin, tu sais, ce que les autres disent de nous, tu crois que c'est vrai ? peut-être que je suis amoureux de toi ?

ses yeux ont pétillé en même temps qu'elle souriait.

– tu veux rire ? tu as vu comment tu me traites ? évidemment que non, vi. évidemment que non.

une déesse, c'est fait pour être glorifiée, chantée, peinte, louangée. victorine peut bien recevoir sacrifices et bacchanales, il n'y en aura toujours que pour sa parole divine, accomplie à travers des yeux en amandes étoilées. après faut pas s'étonner qu'elles aient parfois envie d'être mortelles, les déesses.

mom dit
c'est pas contre les aliens qu'on doit se battre. ils sont innocents. c'est contre les discours du gouvernement qu'il faut lutter. ils pouvaient pas prédire, les aliens, comment réagirait les gens. peu importe s'ils viennent pour nous bouffer ou pour nous saluer. nous devons lutter contre nos propres paroles, nos propres dires, car ils véhiculent d'autres discours qui ne sont pas mieux. tant qu'on ne s'attaque pas à ça, il peut bien y avoir une nouvelle espèce d'alien ça changera rien. le langage, c'est ça le pouvoir. on pourrait décider qu'une cuillère, maintenant, c'est plus utile que les pauvres, si tu trouves le meilleur manipulateur de mots, tout le monde te croira. quand on aura changer les discours on aura changé l'avenir.

victorine pk t'es partie c t toi mon héroïne
rire ; courir ; chanter ; crâner ; manger des fleurs ; aimer iron maiden ; dire tu veux baiser à n'importe qui ; rouler dans les bars ; sniffer ; fumer ; rider un poney ; bouffer du gazon ; puer ; hurler ; caracoler ; péter ; chier ; mugir ; fuir ; faire les beaux yeux ; se convertir ; arrêter les maths ; brûler science et vie ; vendre ses jeux ; se dénoncer ; élever des vers ; avoir un frère ; se marier ; divorcer ; crever.

river était prêt à mourir.
river aurait décrocher vega ; réorganiser le ciel

il faut que tu reviennes.
pourquoi t'es partie comme ça
sans rien me dire
pourquoi j'arrive plus à te contacter
pourquoi j'ai rien vu venir
c'était parfait avec toi
maintenant je sais plus comment on fait
pour dire bonjour pour dire à plus
t'es où victorine


j'ai froid sans toi
mon enfance, c'était toi